Pour une nouvelle politique du logement
Le droit au logement s’exprime bien sûr par la construction, par la rénovation mais aussi par la prise de conscience claire par une société donnée, que tout au long de sa vie, une personne a le droit de vivre dans un lieu choisi et adapté. Il faut donc définir une grande politique du logement avec les financements correspondants.
La gravité de la situation appelle une autre approche que celle qui consiste à agir toujours à la marge, que ce soit pour aider les plus démunis à ne pas sombrer, ou pour limiter les excès du marché. Elle impose d’agir sur le cœur de la politique du logement, d’en repenser les orientations générales afin que le logement réponde enfin aux besoins sociaux, partout où ils existent. De ce point de vue nous nous appuyons sur la fondation Abbé-Pierre qui, avec la participation de nombreuses organisations, a élaboré un « contrat social pour une nouvelle politique du logement » autour de quatre axes majeurs :
produire suffisamment de logements accessibles,
réguler les marchés et maîtriser le coût du logement,
œuvrer pour plus de justice sociale et de solidarité,
construire une ville équitable et durable.
La garantie de pouvoir bénéficier toute sa vie d’un véritable droit au logement pourrait mettre à mal le système marchand proche de l’arnaque qui n’hésite pas à condamner des foyers à s’endetter pour des décennies, au prétexte de devenir propriétaire, loin de la ville si les moyens de la famille sont restreints. En Vendée, par exemple, toutes ces dernières années des milliers d’hectares de terrains agricoles, proches des bourgs, ont été urbanisés. Le risque, et déjà ça existe, que ces « nouvelles villes » deviennent des zones de relégation qui ne l’avouent pas, mais qui ressentent plus qu’ailleurs encore, le poids des difficultés et des malheurs du quotidien. Dans ces « nouveaux lieux de vie », les services publics font souvent défaut.
La question du logement, dans un pays riche comme le nôtre, avec sa longue expérience du logement social maintenant centenaire ne peut pas se penser en dehors de la recherche d’une véritable mixité humaine, dans une ville « multifonctionnelle », créant un climat tangible de solidarité et de moments partagés. C’est le grand défi des décennies à venir.
Ce défi du droit à la Ville pour tous suppose de la part des élus, ce qui n’est pas le cas ici, de donner la parole aux habitants et surtout de les écouter. Avec eux ilfaut réinventer notre façon d’habiter et de vivre ensemble, qui interroge collectivement l’intérêt général et donne du sens à une action publique.
Confronté à cette double exigence, d’une part répondre en urgence aux besoins de logements actuels et d’autre part anticiper ce nouveau « boom » démographique, nous proposons d’expérimenter, partout là où c’est possible, ce que nous appelons « Les Habitats participatifs ». C’est à dire développer « l’habitat groupé autogéré ». Des collectifs d’habitants qui revendiquent une autogestion du quotidien et une maîtrise de leur cadre de vie fondées sur une critique de la massification du parc social et de l’individualisme du petit pavillonnaire. Il faut initier de nouveaux rapports de voisinage, de nouvelles formes de solidarité et de nouveaux rapports à la propriété par une certaine forme de ré-invention du quotidien.
Il faut permettre aux habitants de devenir acteurs d’un dispositif de promotion et de fabrique de la ville, dont ils sont ordinairement de simples usagers et des spectateurs passifs. Il s’agit de construire des pratiques qui ne sont plus strictement dictées par les orientations de l’argent public mais bel et bien d’interroger collectivement l’intérêt général et de donner du sens à une action publique « co-construite ».