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Après Xynthia, faisons revivre l’existant et donnons-lui un avenir !

Écrit par Evelyne Deluze le . Publié dans Aménagement du territoire

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Lettre ouverte à Monsieur le Président du Conseil Régional des Pays de la Loire

Monsieur le Président,

Près de 3 ans après la tempête Xynthia, il y a beaucoup d’agitation dans nos deux communes de la Faute et de l’Aiguillon sur Mer. Pour autant, les décisions concrètes tardent à venir. L’Etat et ses services nous donnent l’impression de se « défausser », le Conseil Général est pratiquement aux « abonnés absents » et le Conseil Régional est, semble t-il, plus enclin à « peaufiner » son image qu’à être en phase avec la réalité du terrain. Quant aux élus locaux, leur pouvoir est bien mince.

La triste réalité est là : rien n’a été fait pour protéger les populations. On a rasé les maisons, décrété un PPRI draconien à la limite de l’absurde. Il est de plus dangereux parce qu’il condamne à brève échéance le devenir de notre commune. A chaque nouvelle « grande marée », c’est la peur au ventre qui nous assaille.

Nous voulons relever le défi. 

Nous le savons, la mer n’est pas toujours notre amie. Elle nous rend les coups que nous lui avons portés et que nous lui portons encore. On voudrait nous voir désemparés, pour mieux, sans doute, nous faire accepter la fatalité. Ce que nous voulons, c’est trouver les bonnes solutions. Elles existent.

A notre demande de « protection », on nous répond « rentabilité », ratio « coût/bénéfice ». Nos vies vaudraient-elles moins que leurs satanés profits ? Nous sommes en droit d’en douter !

Et puis voilà que l’on nous annonce, à grands renforts de publicité et de communication, de simulacre de concertation, la mise en place de « Litoralis », un « lieu de mémoire et de connaissance ». Coût de l’affaire : pas connu à ce jour ! « Il reste à déterminer », nous disent les représentants du Conseil Régional. Mise en place de grandes structures portuaires de plaisance ; quid de ceux qui aujourd’hui, et ce depuis des années, pratiquent leurs loisirs à la Faute et l’Aiguillon sur Mer ? Est-ce vraiment de cela dont nous avons besoin ? La question se pose.

Le projet d’un port à sec est-il un atout pour le développement de nos communes sinistrées ? Il est en tout cas un pari risqué quand on connaît bien les exigences du Lay. Mais au-delà de sa pertinence, il y a le site proposé qui fait disparaître la première structure portuaire de plaisance sur la commune de la Faute sur Mer. Cette enclave, qui ne contient pas moins de 42 bateaux, fait partie de notre patrimoine maritime. C’est même devenu une véritable image d’Epinal qui symbolise si bien La Faute et l’Aiguillon, unis par ce Lay aux méandres enchanteurs.

Peut-on conjuguer le passé et l’avenir sans être traité de passéiste ? On associe en général le mot « progrès » au mot « modernité ». Mais la modernité n’est un progrès que si elle est rattachée au mot « humanité ». Un aménagement environnemental ou une avancée technologique n’ont d’intérêt que s’ils facilitent, enjolivent ou harmonisent notre existence, en ne déshabillant pas Paul pour habiller Jacques.

Quel que soit le projet portuaire retenu, bassin tampon pour port à sec ou marina, il sera du devoir moral des décideurs de sauvegarder ce site portuaire si pittoresque, qui permet d’offrir aux usagers locaux des appontements à des tarifs acceptables, car chacun sait que la maintenance d’une marina entraîne des tarifs d’exclusion. Il ne faudrait pas que le rêve de vulgarisation du petit croiseur côtier d’Eric Tabarly, avec son Pen Duick 600, soit mort avec lui en mer d’Irlande ! La plaisance ne doit pas devenir le domaine réservé des rescapés de la crise !

A chacun son port selon ses moyens n’est pas en soi une formule discriminatoire, le mélange des genres est possible. Il témoigne d’ailleurs de la bonne santé de cette démocratie si souvent abîmée par des donneurs de leçon qui ne mettent jamais leurs actes en accord avec leurs discours. Plus que jamais, nous savons que « l’enfer est pavé de bonnes intentions ». Le« Bien vivre ensemble »demeure notre leitmotiv et la pierre angulaire de notre réflexion.

Il est impératif :

-          de sauvegarder cette enclave, témoin de notre patrimoine maritime

-          de pérenniser les appontements traditionnels qui participent aux charmes de notre Lay et qui garantissent un accès portuaire à tous, et non une pratique de tarifs d’exclusion.

Ce sont des projets de cette nature qui permettront de panser les plaies de Xynthia et remettront en lumière L’Aiguillon sur Mer et La Faute. Il est possible de marier avec bonheur passé et avenir pour le bien de tous.

Le monde de la plaisance ne doit pas dériver vers les populations les plus aisées mais doit s’ouvrir à une population plus large parce que moins argentée.

Notre ville et nous 

Nous, ce que nous voulons, c’est « Vivre dans une commune qui doit avoir les moyens de se reconstruire et d’évoluer ». Nous ne demandons pas l’impossible, mais nous ne voulons pas vivre dans une « réserve d’indiens » où l’on « viendrait nous voir », car nous serions « ces survivants, ces bêtes curieuses ». C’est non, trois fois non : le « voyeurisme », nous avons déjà donné. Ce n’est pas notre vie !

Nous voulons du concret, pas d’un endroit où l’on va expliquer ce qu’il faut faire face aux aléas de l’océan. Nous, nous savons ce qu’il faut :

Il faut de la protection et, de ce point de vue, on ne voit rien venir.

Il faut de la mémoire, c’est vrai, mais pas celle qu’on voudrait nous imposer.

Toutes ces dernières décennies, la mémoire « vivante » a été écrasée : la mémoire des paysans, la mémoire des éclusiers, la mémoire des pêcheurs. La réalité et l’efficacité des services publics ont été oubliées. La « connaissance » des Hommes a été sacrifiée parce qu’il fallait faire passer la « rentabilité » avant tout le reste. C’est le choix de l’argent au détriment des Humains.

Maintenant que le mal est fait, l’Etat, la Région, le Département, nous envoient leurs « experts » et chacun compte bien tirer quelques « avantages politiques » de ce soudain « intéressement » à notre situation. Un peu de décence dans leurs diverses déclarations feraient du bien. Est-ce trop leur demander ?

Le PPRI, Plan de Prévention des Risques d’Inondation de l’Aiguillon sacrifie des centaines d’hectares de surfaces, empêchant ainsi le développement de notre commune. Le projet du Conseil Régional va, lui, bloquer 2 000 m2 de terrains constructibles. Pour quelle fin ? L’argent, mais nous ne connaissons pas le coût de ce projet. Ne pourrait-il pas être utilisé autrement ?

Notre exigence : être écoutés, enfin écoutés !  

Près de trois ans après la tragédie, notre conviction n’a pas changé : oui, les risques existent, mais L’Aiguillon et La Faute ont une forte filiation avec la mer. Nous sommes conscients des aléas existants. Mais, comme l’ont fait les anciens, il faut avoir un minimum de protection pour répondre aux tempêtes qui sont notre quotidien.

Ces deux communes se sont développées à partir de leurs vrais atouts : la connaissance de leur population qui savait anticiper les « évènements », une politique de prévention et de protection qui ne se pliait pas à la sacro-sainte loi de la rentabilité, un arrière-pays protégé, fort de ses écosystèmes. Toutes ces « mémoires » de nos anciens ont été « écrasées », de peur qu’elles ne fassent force de Loi !

Donner un avenir à l’existant

D’abord les gens ! Nous avons besoin de tranquillité, de respect. Notre dignité et parfois notre souffrance ne sont pas à « vendre », à « monnayer ».

Et les atouts locaux ?

A qui peut-on faire croire que l’avenir et le devenir de l’Aiguillon seraient dans la concentration des productions mytilicoles sur 1 ou 2 gros établissements, au détriment des dizaines de « petits » producteurs qui existent actuellement ? Au contraire, nous avons besoin de défendre cette pêche artisanale qui a fait ses preuves. On nous dit « oui mais c’est la faute à l’Europe ». Pas acceptable, il faut refuser ces traités et les renégocier. Ils sont contraignants et nous font mourir à « grands feux ».

Ce n’est pas en obligeant les professionnels de la mer à se mettre à des normes dont on  peut parfois douter de la pertinence et qui vont permettre à quelques-uns de « faire la pluie et le beau temps » dans la profession, que « ça ira mieux demain » à L’Aiguillon. Il faut tout le contraire, à savoir défendre les professions de proximité : celles qui ont encore du sens et de l’histoire.

On nous dit aussi : « il y a l’écrin touristique ». En matière d’écrin, nous sommes vernis ! Il n’y a pas « d’écrin » sans une activité d’emplois, sans le respect des cultures locales. Nous pensons, entre autres, à l’existence de toutes ces « cabanes » de pêcheurs, à l’existence de cet artisanat et ces commerces de proximité. Pas « d’écrin » si la démocratie locale est bafouée. Tous ces projetsne pourront être acceptés que s’ils sont partagés et portés par la population. Pas « d’écrin » si les jeunes ne trouvent pas toute leur place dans les activités locales, dans les décisions. Pas « d’écrin » sans services publics, de la petite enfance aux personnes âgées.

« L’écrin touristique », ce n’est pas développer la plaisance au détriment des professionnels de la mer, ce n’est pas laisser ensabler la Pointe d’Arcay, en sacrifiant les bouchots, mais c’est bien, avoir une réflexion à partir des atouts locaux : pêche, plaisance, agriculture, tourisme familial.

Lors des premières réunions, à l’initiative de la Région, nous avions attiré votre attention sur la priorité de la protection qui, ensuite, pourrait conduire à la mise en place de projets économiques et touristiques, mais pas l’inverse.

Nous avons le sentiment d’être enfermés et bernés par des « politiques décideurs » qui nous imposent des projets qui ne nous apportent pas satisfaction et sécurité. Vous devez nous écouter et porter nos projets !

Notre priorité :   Nous réaffirmons notre priorité : la Protection de notre commune. Elle est simple à établir et à construire. Mais aujourd’hui, entre les imbroglios administratifs et les non-volontés politiques, rien n’est fait ! La balle est bien dans votre camp. Beaucoup d’argent (notre argent) a été consacré à des études onéreuses, qui conduisent à d’autres études tout aussi onéreuses, alors que les travaux de protection tardent à se mettre en place.

Nous qui sommes de L’Aiguillon sur Mer et qui aimons L’Aiguillon sur Mer, nous disons « Stop » à la mégalomanie et nous rappelons notre exigence : « Faisons revivre l’existant et donnons-lui un avenir ! »

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