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L’Ecole, comment ça va en Vendée ? Le débat doit être ouvert !

Écrit par Bernard Violain le . Publié dans Actions en cours

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Les vacances de la toussaint auront été utiles au Ministre de l’Education nationale. Elles ont désamorcé les divers mécontentements des enseignantes, des parents d’élèves et aussi, à leur niveau, des jeunes. Pour autant, la grogne n’a pas disparu et le gouvernement et sa majorité parlementaire commettraient une grave erreur s’ils venaient à penser qu’à « L’Ecole » tout va.

Le dossier des rythmes scolaires reste un sujet de forte fixation en maternelle et primaire. Le Directeur Académique, Directeur des Services Départementaux de l’Éducation Nationale, ...

a adressé, le 16 septembre dernier, un courrier aux écoles et aux maires du département pour les informer qu’il avait fixé au 22 novembre prochain la date butoir pour que ceux-ci ou celles-ci retournent les horaires de chaque établissement scolaire. Cet échéancier a été établi en l’absence de concertation. Trop souvent déconnecté des réalités locales,  il soulève nombre de questionnements.

Sur les 282 communes que compte le département de la Vendée, moins d’une dizaine seraient rentrées dans cette réforme des rythmes scolaires. (6 pour être précis).

Ce très faible « engagement » des élus locaux et du corps enseignant pour mettre en œuvre cette réforme aurait dû conduire le Directeur Académique, et au-delà toute la hiérarchie scolaire, à vraiment décider d’une concertation « poussée ». Il ne semble pas que ce soit la voie choisie.

Il va pourtant bien falloir écouter les enseignants, les parents d’élèves, les personnels territoriaux et les élus, sans compter les chercheurs en science de l’éducation. C’est à tous les niveaux qu’il faut tirer tous les enseignements, en prenant bien en compte les réalités vendéennes.

Partir des réalités vendéennes.

D’une part, la Vendée se classe dans le peloton de queue des départements français en ce qui concerne le niveau réel de scolarité. S’il y a de bons résultats au baccalauréat, c’est aussi et paradoxalement en Vendée que le taux de sortie scolaire sans diplôme ni qualification est le plus élevé.

D’autre part, c’est en Vendée que le recours à l’apprentissage est le plus dense. Au rythme où les choses évoluent il y aura bientôt plus de jeunes en apprentissage qu’en lycée professionnel. L’apprentissage n’a jamais été une filière d’éducation. Un apprenti n’a pas le statut « d’étudiant ». Il a le statut de salarié. Les différentes études récentes conduites sur une « cohorte » d’apprentis montrent qu’un jeune qui a fait ses études par apprentissage a deux fois moins de chance de retrouver un second emploi qu’un jeune qui a été scolarisé en lycée. Ceci est pour les jeunes qui ont suivi un CAP ou, hier, un BEP. 75% des titulaires d’un bac pro, obtenu dans l’éducation nationale a lui aussi 2 fois plus de chance de réussite. Chiffre encore plus élevé pour un BTS, qui aura 3 fois plus de réussite professionnelle sur une longue durée qu’un apprenti du même niveau de qualification.

Autre réalité : 80% des jeunes Vendéens n’ont que l’école pour apprendre. Ceci est aussi le résultat d’une réalité sociale et économique. Les grands parents, les parents, voire la dernière génération de parents ont été formés « à la dure ». Autre exemple, des parents qui ont eu un Bac général dans les années 80, voire de façon encore plus récente, occupent aujourd’hui des postes d’ouvrières ou ouvriers qualifiés. Les « déqualifications » font partie de ces réalités vendéennes. Ce n’est pas qu’ils ont un niveau de culture générale trop bas, bien au contraire. Mais aujourd’hui, pour beaucoup d’entre eux, les « apprentissages » des connaissances se sont particulièrement complexifiés. Les « transmettre » aux jeunes, c’est « galère » ! Faire appel  à des « officines privées » pour donner aux enfants, voire aux jeunes lycéens des « compléments » de formation, coûtent trop cher, eu regard de ce qu’est le pouvoir d’achat des familles. Le dualisme scolaire, même si, et nous nous en félicitons, celui-ci recule au profit du service public d’éducation, a plutôt tendance à tirer vers le bas le niveau général d’éducation.

Il faut aussi parler des moyens d’accompagnement des jeunes dans leur cursus scolaire. Beaucoup, beaucoup trop de jeunes passent un temps « fou » dans les transports scolaires, du primaire jusqu’à l’enseignement supérieur. Ceci engendre de la fatigue supplémentaire. Nous pourrions aussi parler des équipements culturels dans les communes. Une forte idée converge de tout ceci : les jeunes Vendéennes et Vendéens ne sont pas à égalité devant le droit pour toutes et tous à une éducation de qualité.

Enfin, sans doute l’aspect le plus dramatique : l’école Vendéenne, dans les conditions de ces réalités, souffre d’un manque criant de moyens.

Non à l’arbre qui cache la forêt.

La question des rythmes scolaires ne peut donc être « l’arbre qui cache la forêt ». L’Ecole en Vendée mérite un débat de fond, une expertise fondamentale, pour dégager ensemble des solutions pérennes et résolument à la hauteur de ce qu’attendent de l’Ecole les parents d’élèves et les jeunes eux-mêmes.

Derrière cette problématique des rythmes scolaires, se précisent de grands enjeux. Le Front de gauche en Vendée affirme les grands axes suivants :

D’abord, l’école doit avoir lieu à l’école. C’est le meilleur moyen pour l’enfant de réussir ! Pas d’externalisation des programmes jugés moins nobles donc moins nécessaires aux enfants, pas de matières mises de côté par l’éducation nationale et confiées aux animateurs du périscolaire. Le sport, l’éducation musicale ou artistique… sont tout aussi nécessaires au développement des enfants que les mathématiques ! Sans compter que  la mise en œuvre du décret, dans chaque localité de manière différente, renforcera les inégalités entre communes riches et pauvres, rurales et urbaines, quartiers populaires et quartiers  huppés. Qui va payer ? Les communes, les familles ?

L’école à l’école ce sont les moyens donnés aux enseignants d’exercer leur métier (y compris avec des intervenants dans les classes). C’est un Etat qui assume ses responsabilités et ne renvoie pas le traitement de la difficulté scolaire aux collectivités locales et aux familles. Un Etat interpellé sur les ouvertures de classes, les effectifs, les réseaux d’aides, la solidarité entre les territoires, l’étranglement des budgets communaux.

L’école à l’école c’est reconnaitre les métiers de l’animation, les valoriser, les mettre sous statut avec des formations pour aller vers un grand service public de l’animation, de l’accueil de l’enfance et en améliorer la qualité.

On ne peut que se réjouir que moins d’un quart des communes aient décidé d’appliquer la réforme  cette année. La mise en œuvre des nouveaux rythmes scolaires doit se faire dans le cadre d’un « cadrage » qui garantisse que l’école aura les moyens de remplir toutes ses missions et que tous les enfants auront accès à un périscolaire de qualité sur tout le territoire. Il faut aussi définir une autre conception du rôle des municipalités dans les politiques éducatives : non pas pallier les défaillances du service public national mais offrir à tous les enfants l’environnement culturel riche et divers qui leur permettra de découvrir d’autres horizons et qui les aidera à réussir à l’école, ce qui suppose aussi pour les communes des moyens pour faire face à ces nouvelles responsabilités.

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